Artiste Céramiste – Alice Aucuit

Statement

Alice Aucuit

Alice Aucuit, à travers l’emploi de l’argile propose des interrogations sur la fonction et le statut de l’objet, sur la frontière mouvante entre l’art contemporain et l’artisanat, sur le fait main et la série. Elle Jongle entre une production utilitaire colorée et décalée sous l’appellation “O’ grés d’Alice” et des créations artistiques qui prennent la forme d’installation, de sculpture ou de performance. Alice défend la possibilité d’accorder démarche artistique contemporaine et savoir faire traditionnel.

La céramiste traite sous des formes diverses, de la relation entre événements quotidiens, faits d’actualité et mémoire collective ou personnelle, du rapport entre l’Homme, la culture et l’objet. Elle confronte souvent des images du passé, des objets ou des textes anciens avec des situations contemporaines et des figures modernes. Cela se traduit souvent par un syncrétisme iconographique ou les notions d’accumulation, de répétition, d’hybridité, d’anachronismes, de parodie, sont récurrentes dans son travail.

Un texte ou un jeu de mot peuvent devenir le point de départ d’une recherche artistique tout comme un fait historique, un lieu ou une actualité qu’elle met souvent en parallèle mélangeant le sacré et l’ordinaire, le populaire et le précieux, le public et l’intime, avec humour et sensibilité.

« Alice Aucuit n’est pas née au Pays des Merveilles loin de là, elle ne croit pas aux contes de fées, elle fouille les plis de l’histoire pour y retrouver celles et ceux qui y ont été oubliés et les faire émerger, de grès ou de faïence. Elle porte en elle « cette poésie […] cette atmosphère de rêve et de magie qui, pour certaines imaginations, se dégage tout naturellement du spectacle même de la réalité » (Edmond Jaloux).

Céramiste, elle se couvre de glaise en performance (Two clay, 2010) , expose l’os dans sa plastique magnifique (« L’os comme essence de l’Homme », 2011), grimpe l’arbre de la vie et y plante un slogan : « no future » (« Tree life », 2013 ), et panse les blessures des luttes urbaines du passé de ses colombes de la paix (« Des colombes pour la Commune », Histoire(s) de rues 2011).

Avec son énergie insatiable, sa curiosité débordante, Alice Aucuit réinterprète l’art de la céramique pour – au-delà de son rôle premier de fournir un contenant, ou de décorer une surface – mettre en lumière le contenu et faire parler les murs. La flamme qui brûle et qui transforme devient son allié pour révéler l’alchimie de l’homme, ses folies historiques comme ses joies de porcelaine.

Mais l’artiste est avant tout femme et, en tant que telle, porteuse d’avenir et héritière de la mémoire secrète soufflée de bouche à oreille depuis les premières gardiennes du foyer. Quand elle accroche aux arbres ses Barbies détournées (« Des fruits étranges à Plainpalais », Histoire(s) de rues 2011 »), elle est solidaire des victimes du patriarcat et des raideurs des monothéismes. Pour elles, Alice Aucuit fabrique des amulettes de verre aux âmes émaillées.

« J’ai rencontré la pétillante Alice à Saint-Pierre dans le sud de l’île de la Réunion en 2011, et au fil d’un mois, ou plutôt d’une dizaine d’heures d’entretiens, elle me raconta avec enthousiasme les aventures que son art millénaire lui faisait vivre : de la prestigieuse école de Vevey en Suisse en passant par les potiers de Chine. Petit à petit, la collection foisonnante de ses pratiques, la joyeuse pagaille des formes et des associations inattendues prirent cohérence pour révéler une oeuvre engagée, pleine d’humour et de sérieux. »

Laurette Tassin